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Touareg du Niger, rencontres au fil du temps
Touareg du Niger, rencontres au fil du temps
Touareg du Niger, rencontres au fil du temps

Arts et Culture nomades

Le Peuple touareg lutte pour préserver son identité et sa culture.

Poètes, musiciens, artistes touarag témoignent des combats de ce Peuple du désert, marginalisé et méconnu.

Au fil du temps...
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14 avril 2009

Uranium et charbon au Niger

 

Rhissa Rhossey

rhissa_rhossey

PRIÈRE D'UN BOUZOU

Le  charbon sort de chez moi / Mais je suis dans les ténèbres / L'URANIUM sort de chez moi / Mais je suis pauvre. / L'Aïr est une immense nappe phréatique / Mais j'ai soif.  / Chez moi, il y a d'immenses / Plaines fertiles... inexploitées / Chez moi il y a deux axes routiers / Celui qui Exporte l'Uranium / Et celui qui Exploite le Charbon. / Et vous voudriez que je me taise / De toute façon je me tais / Puisque je suis Analphabète / Et patati patata / Que les bavards se taisent / Que les braves meurent / Et que les lâches coopèrent / Pour la pérennité du système / Des loups.

Amen !

Rhissa Rhossey «Jour et Nuit, Sable et Sabg, poèmes sahariens» Ed Transbordeurs

mamane abou

A MON COMPAGNON DE TOUJOURS : LE RÉPUBLICAIN - NIGER 

LE RÉPUBLICAIN

D'entrée de jeu, je me définis comme un citoyen nigérien, certes un obscur citoyen nigérien, mais un citoyen nigérien quand même. Et cela me suffit entièrement, parce que je suis fier d'appartenir à cette nation digne parmi les dignes. Je ne suis ni un journaliste ni un avocat mais peu importe. « Ma bouche sera la bouche des malheurs qui n'ont point de bouche », n'est-ce pas Césaire ? « Car un homme qui crie n'est pas un ours qui danse », n'est-ce pas -encore toi- Césaire ?

Je ne suis qu'un sans voix qui voulait faire passer son cri à travers votre journal, votre courageux journal, qui est une sorte de «fouette-conscience» sur le lac calme de la pensée unique à la nigérienne.

Habitant modeste d'un des coins de ce pays, dans sa partie septentrionale qu'on appelle Tchirozérine. Oui, beaucoup connaissent ou ont entendu parler de cette ville, ce chef-lieu d'arrondissement.

Oui ce nom, entendu à l'intérieur du pays, évoque naturellement une ville fantastique, aux rues larges, éclairées d'immenses lampadaires, arrosées d'innombrables fontaines, n'est-ce pas le site de la Sonichar depuis plus de vingt ans ?

Mais détrompez-vous, Tchirozérine, c'est juste une petite bourgade avec quelques quartiers fort différents, jetés à la « je m'en fous» à travers quelques collines éparses brûlées de soleil, avec deux grandes cheminées crachant inlassablement dans l'air une poussière noirâtre. C'est tout, ne cherchez pas plus, c'est ça Tchirozérine.

Absence criante d'infrastructures qui pourraient distraire sainement une jeunesse rompue au chômage: maison des jeunes, bibliothèque. On vous dira que les dossiers sommeillent dans les tiroirs, mais depuis combien de temps dorment-ils, d'ailleurs se réveilleront-ils un jour ?

Oui, le jour c'est encore mieux, car Dieu, qui est équité, dispense son énergie solaire à parts égales à l'ingénieur comme au jardinier. Mais c'est surtout la nuit que le contraste apparaît dans toute sa monstruosité. Alors là apparaît le grand paradoxe: d'un côté une ville surilluminée avec ses excès, de l'autre Tchiro avec ses autochtones baignant dans la nuit, ou plutôt ses nuits, car cette nuit n'est pas seulement physique, mais aussi absence de lumière morale.

N'est-ce pas toi Richard Wright qui disait à propos de tes frères « ils voient de l'obscurité en plein jour et marchent à tâtons en plein midi comme si c'était la nuit» ? Oui, c'est cela. Ne vous aventurez pas dans Tchiro la nuit, vous risqueriez de vous retrouver le nez dans un caniveau immonde, ou soyez prudent, emportez votre lampe torche.

Le charbon d'Anou Araren n'est pas lumineux à Tchiro. Dans ma jeunesse, j'ai lu des auteurs sud-africains confrontés à l'apartheid, les townships qu'ils décrivaient ne sont pas très différents d'ici. Ouvrez Peter Abraham ou André Brink et vous comprendrez.

La nuit, en regardant la ville du haut d'une de ces innombrables collines, un fort sentiment d'injustice vous saisit et vous vous dites, au fond de vous-même: « Oh Seigneur, ceux-ci, qui sont dans le noir, quel est leur crime? Et ceux-là, dans la lumière, connaissent-ils seulement le sens du mot "partage" ou bien leurs néons les ont-ils aveuglés à ce point? Oh Seigneur, faites la part des choses, après tout, vous êtes l'Omniscient ! »

De temps en temps, une personnalité en vue, un ministère en mission ou un député en campagne passe par là et dit « éclairez la ville, abreuvez-la », mais hélas, le temps d'un discours...

Cet espoir éphémère ressemble bien à un couteau dans une plaie : il nous rappelle notre douleur. Ce n'est certainement pas par hasard qu'une bonne poignée d'hommes a marqué la rébellion des années quatre-vingt-dix et est sortie de ces taudis. Mitterrand disait: « Quand les inégalités, les injustices ou les retards d'une société dépassent la mesure, il n'y a pas d'ordre établi qui puisse résister au soulèvement de la vIe. » Il y a tout juste vingt-trois ans (octobre 1981).

Ce que je dénonce aujourd'hui, d'autres l'ont fait auparavant, ils étaient forts (tant qu'ils n'appartenaient à aucun système) et sincères aussi : ils ne voulaient pas d'un fauteuil de ministre ou même de président. Mais hélas les eaux usées arrosent encore les jardins des abords de nos sociétés, et sur la route de l'uranium, il n'est pas rare de voir quelqu'un quémander de l'eau à boire. Hier Deby a inauguré ses puits de pétrole, et il a fait un très beau discours. Mais la réalité, c'est l'Homme de la rue et l'Histoire qui nous la montreront avec le temps.

Non ! Dans nos luttes, rien n'est grave. si ce n'est de perdre l'Amour.

Rhissa Rhossey «Jour et Nuit, Sable et Sabg, poèmes sahariens» Ed Transbordeurs

 

PARA NYMPHE POUR UN MUSELÉ

Ils l'ont encore arrêté / Mon pote / Pour la énième fois / Décidément tu n'as pas la cote / Oui ta salive est sabre / De canon contre leurs mensonges  / Ton encre acide / qui dévoile / La toile mesquine de leur supercherie / Rappelle-toi mon pote / Hier c'était le feu / Ils ont brûlé Le Républicain. / Naïfs, ils ont bastonné pour faire / Taire la conscience / Aujourd'hui ils bâillonnent / Ils bâillonnent la grande gueule / Ou la grande plume / Oui la conscience éclairée de / La presse nigérienne, j'ai dit :  / Mamane Abou ! / Et je vois le pays entier debout  / Debout dans les rues pour dire NON ! / Libérez-le, il n'a fait que DÉNONCER / Libérez-le, il n'a fait qu' Écrire : Libérez-le, il n'a fait que DÉVOILE : Dé-voi-lé

Pour Maman Abou, directeur du journal «le Républicain», édité à Niamey. Militant dans l'opposition, il est sous les verrous à Say, au moment d la rédaction de ce poème

Rhissa Rhossey  «Jour et Nuit, Sable et Sabg, poèmes sahariens» Ed Transbordeurs

Issa Rhossey et H. Lemaréchal

Histoire d'une rencontre

«Fin novembre 2006 peu de temps après mon arrivée à Niamey, j'apprenais la libération de Maman Abou, le cofondateur du journal d'opposition "Le Républicain". Issa lui avait consacré deux textes dans son premier recueil de poésie. Le premier : "Para nymphe pour un muselé" était dédié à Maman et avait été écrit alors qu'il croupissait dans la prison de Say. Le second "Le Républicain" est un hommage au journal qu'il arrivait parfois à se procurer lorsque lui-même dut connaître les cachots nigériens à Kollo et "meublait sa solitude".Le 1er décembre, lors d'une conversation téléphonique annonçant mon arrivée à Rhissa, je lui apprenais la libération de Maman. J'entends encore le cri de joie qui en résultat. Cette photo est donc symbolique. Nous sommes en pleine lecture du Républicain, quelque part dans l'Aïr, qui relate la libération de notre ami. Entre temps, j'avais eu le plaisir de passer une soirée extraordinaire chez le Grand-Homme. C'est vraiment un souvenir magnifique que cette rencontre avec celui que nombre de Nigériens appelle "notre Mandella". J'espère qu'il ne lira pas ces lignes... Eu égard à sa modestie.»

H. Lemaréchal   

 

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