Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Touareg du Niger, rencontres au fil du temps
Touareg du Niger, rencontres au fil du temps
Touareg du Niger, rencontres au fil du temps

Arts et Culture nomades

Le Peuple touareg lutte pour préserver son identité et sa culture.

Poètes, musiciens, artistes touarag témoignent des combats de ce Peuple du désert, marginalisé et méconnu.

Au fil du temps...
Suivez-moi
15 juin 2020

Le blues du chant amazigh

 

Tarwa N-Tiniri

tarwa_nTiniri_musicien_touareg

Tarwa N-Tiniri explore et affirme un style musical qui lui est propre. On pourrait se dire à la première écoute qu’il s’agit d’un groupe de blues touareg comme il en existe beaucoup au Sahara, même au Maroc où l’usage du terme « touareg » est plus une usurpation de circonstance, pour simplifier, et sûrement pour séduire le touriste étranger. A travers ce projet artisitique nourri de poésie amazigh et de culture nomade, Hamid, Mustapha, Youssef, Ismael, Mohamed et Mokhtar se font les ambassadeurs d’une nouvelle génération en prise avec une société qui bouscule codes et repères, au risque de rendre irréversible un processus de déracinement, de perte de mémoire.

Après s’être intéressé à Génération Taragalte lors de plusieurs séjours à M’hamid el Ghizlane, à Daraa Tribes, de Tagounite, c’est plus haut dans la vallée du Drâa que Plan B a rencontré les musiciens de Tarwa N-Tiniri, chez eux, dans un village aux allures de ville nouvelle, à la périphérie de Ouarzazate : Tarmigt.

Créé en 2012, le groupe se compose de six musiciens autodidactes, dont trois frères, tous berbères d’origine nomade. Ils ont entre 17 et 24 ans. Depuis leur première scène à Ouarzazate en 2013, ils peaufinent leur projet artistique qui donnera lieu prochainement à un premier album, très attendu.

« Le fruit est mûr » sourit Hamid, chanteur guitariste imprégné de musique traditionnelle qu’il jouait au banjo, instrument de prédilection dans cette région, avant de lancer l’aventure de Tarwa N-Tiniri et de proposer à ses amis de prendre le chemin du blues touareg. Aucun de ces jeunes n’a de figure de référence en matière de chant au sein de sa propre famille. Surprenant.

Youssef, 17 ans, lycéen, Mohamed, 23 ans, licencié en sociologie, expliquent comment faire de la musique n’a de sens pour eux que dans cette histoire d’amitié qui leur permet de vivre au travers de leurs chansons un lien plus fort que les influences musicales dont leurs oreilles sont remplies.

Ce lien exprime avant tout la volonté de s’inscrire dans une identité, une culture, pour créer un maillon dans la chaîne de transmission et diffuser un message de paix. Tarwa N-Tiniri porte dans son répertoire contemporain un désir puissant : conserver dans la mémoire collective les valeurs ancestrales héritées de la culture nomade, pour qu’elles perdurent malgré l’évolution des modes de vie et la modernité.

C’est pourquoi, si la musique de Tarwa N-Tiniri véhicule les sonorités d’un blues du désert tout proche, elle fait aussi référence aux nomades des montagnes et s’adresse plus largement à toutes les communautés berbères disséminées au nord du continent africain.

Pour l’heure, le groupe ne tourne pas encore à l’étranger, mais cela viendra sans tarder, une fois le premier album enregistré et diffusé. C’est la priorité du moment, avec des tremplins qui devraient aider à atteindre l’objectif courant 2018.

2017 marque une étape importante pour Tarwa N-Tiniri avec Tanjazz et Visa for Music avant l’enregistrement du 1er album

Que ce soit à Tanjazz ou à Visa for Music où Tarwa N-Tiniri était programmé dernièrement, les musiciens ont pris conscience du chemin parcouru, de la portée prometteuse d’un travail consciencieux et exigeant. Ces jeunes artistes ont un seul mot d’ordre : persévérance et confiance, sans jamais tomber dans le piège d’une impatience, d’une recherche de visibilité qui nuirait à la qualité, à la crédibilité d’un projet artistique original vécu également comme une création  sociale, entre recherche et collectage.

« La musique est notre seul moyen d’expression. Le travail d’écriture de nos chansons est déjà en soi une histoire collective à laquelle nous associons nos anciens, pour vérifier les faits, trouver le mot berbère le plus approprié, s’assurer de la portée poétique de nos paroles ». Hamid.

La poésie amazigh est difficile d’accès pour qui ne baigne pas dedans. La jeunesse actuelle formatée par l’école et les réseaux sociaux a perdu les codes de cette culture orale, où la poésie sert de phare, de guide.

« Si la poésie s’invite à l’école, c’est pour citer de grands auteurs étrangers, pas pour évoquer les poètes marocains, a fortiori berbères » explique Daoud Ait Ba, frère d’un des musiciens, lui-même passionné de littérature.

Tarwa N-Tiniri réinvente, grâce à la musique et au pouvoir d’envoûtement du blues, cette poésie berbère pour en partager les messages avec la nouvelle génération. (Tarwa signifie « génération » en amazigh, N-Tiniri renvoie au désert). Depuis les premiers essais de Mockhtar, à l’âge de 13 ans, sur un instrument fait maison, baptisé « lottar » faute de référence, les amis ont développé avec témérité et passion un lien privilégié avec leurs fans.

« Tout le monde attend notre premier CD, mais nous avons fait ce choix de la scène, de la confiance gagnée de live en live pour que l’album soit vraiment à la hauteur de nos attentes et de celle de notre public ».

En répétition tous les week-ends dans le garage aménagé qui sert de base à Tarwa N-Tiniri, les musiciens ne font pas qu’enchaîner morceau sur morceau. Après chaque concert, ils notent sur un tableau leurs remarques, lors de séances de débriefing. Tous semblent apprécier cette discipline qui les aide à progresser ensemble, à ne pas se disperser ou, pire, à se satisfaire trop vite d’un succès prématuré qui les détournerait de cette volonté partagée d’aller au bout de l’exploration de leur potentiel.

« Tout ce que je sais, souligne Mohamed, c’est que je veux aller le plus loin possible avec le groupe. Si je n’étais pas dans Tarwa N-Tiniri, je ne ferais pas de musique, j’aurais choisi une autre voie pour faire quelque chose de ma vie. Donner le meilleur de soi, avoir un but, se donner à fond pour notre projet artisitique, c’est une motivation que je partage avec mes amis, car nous voulons tous témoigner de l’importance de notre culture nomade et faire passer des messages importants grâce à la scène et à notre projet d’album ».

Cet album, le groupe sait déjà à qui il ira l’offrir lors de sa sortie : une famille berbère rencontrée dans un campement au Sahara, près de M’hamid el Ghizlane, à l’occasion du tournage de leur premier clip « Taryet », terme tamasheq qui signifie « unité » (tamount en amazigh).

« C’était un moment de partage très fort en émotion » conclue Hamid avant de rependre sa guitare et d’entonner un des nouveaux morceaux de l’album, qui permettra à ces artistes de Ouarzazate d’apporter leur signature unique dans le paysage actuel des musiques made in Sahara.

Plan B  le 04 /12:2017

Tarwa N-Tiniri  sur FB

  

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité