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Touareg du Niger, rencontres au fil du temps
Touareg du Niger, rencontres au fil du temps
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Arts et Culture nomades

Le Peuple touareg lutte pour préserver son identité et sa culture.

Poètes, musiciens, artistes touarag témoignent des combats de ce Peuple du désert, marginalisé et méconnu.

Au fil du temps...
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2 juin 2020

Tamikrest : Kidal

 

Une ville, un album, 

Un combat

tamikrest_musicien_touareg

Kidal

Baptisé Kidal en référence à cette ville du nord du Mali chère aux Touaregs, le quatrième album du groupe Tamikrest est conçu d’abord et avant tout comme un véhicule pour servir la cause de ce peuple saharien, défendue inlassablement entre blues incandescent et rock électrique du désert.

L’image surprend : pas de grands espaces sahariens qui convoqueraient facilement l’imaginaire occidental en quête d’exotisme, sur la pochette du nouvel album de Tamikrest, mais une forêt de poteaux électriques, des murs gris, une vaste rue cabossée arpentée par quelques silhouettes fantomatiques. Et un ciel orange. Ambiance pesante, presqu’apocalyptique, dont se dégage une sorte de blues.

Entre cette représentation visuelle forte et ce qu’expriment les onze chansons du CD, le lien s’avère rapidement évident, sur le plan musical. Si le groupe d’Ousmane Ag Mossa a donné à son quatrième album le nom de Kidal, c’est pour montrer son attachement à cette ville du Mali qui semble logée au cœur d’un paysage lunaire, lorsqu’on la devine sur les vues aériennes. Située à une dizaine heures de piste de Gao, en direction du nord-est, elle reste malaimée par une partie de la population du pays, sans doute parce qu’elle fut un bagne à l’époque de la colonisation puis associée à la violence du régime de Moussa Traoré jusqu’en 1991.

Pour les Touaregs, elle occupe une place emblématique dans leur combat politique, culturel et identitaire, cristallisée par les nombreux soubresauts survenus dans un passé récent, à la fois berceau de leur activisme et symbole de la répression dont ils ont été (souvent) victimes. 

«Cet album parle de toute la souffrance et des manipulations exercées sur les populations prises en tenailles de toutes parts», dit aussi un des membres du groupe.

Tout autour de Kidal, le désert malien s'étend dans tous les sens. Des horizons sans fin de roche et de sable, stériles et desséchés. C'est l'extrémité sud-ouest du Sahara, la patrie du peuple touareg, et la ville de Kidal est l'un de leurs principaux centres culturels. Combattue, conquise et reconquise, elle reste le symbole de la défiance et de l'espoir touareg, le foyer spirituel d'un peuple dépossédé.

RFI

C'est aussi la ville dans laquelle Tamikrest  s'est formé pour la première fois en tant que groupe, et sur « Kidal », le quatrième album studio de Tamikrest, le groupe rend hommage à cet endroit qui les a nourris, eux et leur peuple.

C'est un cri de souffrance et un cri de rébellion. C'est la puissance et la résistance. C'est du pur rock'n'roll touareg.

« Kidal parle de dignité », dit Ag Mossa. « Nous considérons le désert comme une zone de liberté de vie. Mais beaucoup de gens le considèrent comme un simple marché à vendre aux multinationales, et pour moi, c'est une menace majeure pour la survie de notre peuple nomade.

Les Touaregs ont toujours été des nomades, leurs vies en mouvement à travers le désert, n'emportant parfois avec eux que le strict nécessaire. Mais pendant un bref instant, ils ont possédé une maison après que les Touaregs se sont soulevés en 2012 et ont déclaré l'État indépendant de l'Azawad dans le nord-est du Mali. Cela a duré moins d'un an, alors que les premiers conduits d'Al-Qaïda arrivaient du nord, imposant le régime islamiste, puis l'armée française est arrivée pour libérer la région - laissant à nouveau les Touareg avec peu ou pas de chance d'autodétermination. Mais le rêve demeure, toujours pris au piège entre les gouvernements et la cupidité des entreprises mondiales.

'Kidal, berceau de tous ces soulèvements, continue de résister aux nombreux actes perpétrés par des mains obscures contre notre peuple', note l'associé du groupe Rhissa Ag Mohamed. « Cet album évoque toute la souffrance et la manipulation de nos populations prises en tenailles de toutes parts.»

Les chansons sur Kidal évoquent une longue histoire. Et pour toute l'électricité, comme l'observe Ag Mossa, « C'est très traditionnel si vous approfondissez ce que je joue. »

Ici, tout est concentré. Tout brûle. Ag Mossa ponctue ses textes de touches de guitare inspirées. Même une chanson acoustique comme « 'Tanakra' » conserve un côté lumineux.

Avec Kidal, cet incendie gronde. Enregistré à Bamako, au Mali, à l'été 2016, l'album a été produit par Mark Mulholland (Afro-Haitian Experimental Orchestra) et mixé par David Odlum, qui a reçu un Grammy pour son travail avec Tinariwen. C'est un album qui a pris deux ans à faire, dit Ag Mossa, « parce que nous partageons les mêmes difficultés de notre peuple». Et les chansons ici reflètent leurs joies, leurs peines et leur refus d'accepter les choses telles qu'elles sont.

Il y a une beauté brute dans le rock’n’roll de Tamikrest. C'est là dans le groove entraînant et insistant qui alimente les chansons, les lignes de basse maigres et sinueuses et les guitares qui s'enroulent et se tordent autour des mélodies, et le mélange musical tout à fait naturel de l'Afrique sahélienne, du Maghreb et de l'Occident - un reflet de des influences aussi diverses que Pink Floyd, Rachid Taha et le flamenco. Pourtant, le Sahara et les gens qui y vivent sont toujours fermement ancrés en son cœur.

« Cette musique a été fondée sur une cause très précise, la cause touareg' » a déclaré Ag Mossa au journaliste Andy Morgan en 2013. Ils sont peut-être menacés de toutes parts, mais ils n'abandonneront pas, et cet album célèbre qui sont les Touareg, les Kel Tamasheq (ceux qui parlent tamasheq), les gardiens d'une voix culturelle ancienne et en voie de disparition.

Le nouvel album de Tamikrest est la musique du défi, de l'espoir. C'est du rock'n'roll saharien, le son du rêve touareg, un rêve qui se renouvellera encore, dans leur ville ancestrale : Kidal.


GlitterbeatTV

 

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